Vingt-troisième jour du mois du Corbeau, An de grâce 632
A mon Grand et Manificent Seigneur, le Roi Ragnar, de son fidèle cousin le Seigneur Ironfist.
Cela fait maintenant trente jours que j’ai franchi les mystérieuses portes menant aux Collines de Varnal. J’ai mis les pieds dans une contrée étrange et inconnue, je le crains. Je souhaite de tout cœur, mon nombre Seigneur et cousin, que cette missive me permettra de mettre un terme à toutes ces rumeurs me concernant. En effet, je redoute qu’elles ne soient déjà parvenues jusqu’à votre Cour.
Je fus profondément choqué, cher cousin, d’apprendre que le sorcier Guthbert avait tenté de vous assassiner. J’ai entendu dire que sous la torture, peu de temps après s’être fait arracher les bras de leur cavité, cet ingrat avait fini par vous révéler mon propre nom, vous affirmant en outre que je l’avais payé pour accomplir cette ignoble tâche. Cher cousin, je ne peux que vous faire part de ma grande désolation depuis que je sais que cous avez cru en sa parole. Vous connaissez ma loyauté sans limites à votre égard. Certes, vous avez pris la main d’Ewine pour en faire votre Reine, certes je l’aime tendrement, mais ce serait là une grave erreur de croire que je puis vous en vouloir au point de souhaiter attenter à vos jours. Ce scélérat de Guthbert aura probablement contrefait ma signature sur la lettre que vous avez trouvée dans ses apparentements. Et le cartable remplir d’or sur lequel était gravé mon nom, je ne puis encore m’expliquer par quels moyens il s’est retrouvé en la possession de ce chien. Je suis convaincu qu’un ennemi que ne connais pas a décidé de s’en prendre à moi en voulant commettre ce crime.
Je vous en conjure, croyez en ma bonne foi.
Je fus amèrement attristé d’apprendre que vos barons avaient décidé de m’arrêter. Et j’ai peine à croire ce que j’entends quand à mon absence. Non, je ne me suis pas rendu sur les collines de Varnal pour échapper à la justice de votre royaume. Je ne suis monté là-haut que pour participer à une chasse, cher cousin – un voyage innocent pour échapper à la chaleur suffocante de la saison estivale, accompagné d’une pognée de mes dévoués serviteurs. Si j’ai emporté quelques bijoux avec moi, c’est simplement pour les conserver en lieu sûr ; lorsque le maître de maison est absent, les domestiques ont la fâcheuse tendance de succomber à toutes sortes de tentations.
Comment je suis parvenu jusqu’à cet étrange pays, cela reste un mystère, même pour moi. Après avec erré sur les collines, quelques uns de mes serviteurs et moi-même avançâmes difficilement le long d’un passage étroit, aux frontières de votre royaume. Tandis que nous marchions, une étrange lumière nous envahit soudainement. Nous retournâmes d’où nous étions venus, mais une sorte de barrière invisible nous empêcha de passer. Nous essayâmes, mais jamais ne parvînmes à passer de l’autre côté. Aussi, nous poursuivîmes notre chemin, descendant les collines en direction d’un monde inconnu et étrange. Tout semblait différent en ces lieux. Le soleil ne brillait pas comme celui qui illumine les plaines nos royaumes : il était plus jaune. Les objets semblaient ne pas regagner le sol aussi prestement lorsque nous les laissions tomber. L’atmosphère, enfin, paraissait contenir de la moisissure en suspension.
Nous avons erré de longs jours durant et ne pûmes trouver aucune trace de piliers qui auraient pu marquer l’existence d’une quelconque frontière. Aucun souverain, aucun roi. Un monde sans Loi. Tout n’était que vie sauvage, indomptable, qu’aucun être civilisé n’avait encore approchée.
Bien entendu, cher cousin, j’ai immédiatement réalisé qu’il s’agissait d’une occasion à ne pas manquer pour étendre votre royaume et remporter en cotre nom honneurs et trésors. Ainsi, je décidai d’établir moi-même des frontières et d’élever votre bannière pour prétendre, toujours en cotre nom, à toutes des terres qui s’étendaient à perte de vue. Je vous en conjure, acceptez ceci comme un signe de mon allégeance et de la ma loyauté envers notre famille et oubliez toutes ces rumeurs. Ce ne sont que parjures et calomnies.
Mon cher cousin et Seigneur, après avoir marché et laissé passer plusieurs aurores, je me proclamai souverain sur ces terres et tentai immédiatement de retrouver vers ces mystérieuses portes, pour vous informer des découvertes fascinantes que j’avais faites en votre nom. En effet, j’aurais préféré m’en entretenir avec en personne, avant que d’autres barons ne vous en parlent les premiers. Mais ces portes étaient encore fermées, je ne pouvais passer de l’autre côté. J’ordonnais donc d’ériger un pilier, pour y placer la présente missive et celles que j’écrirai ensuite, pour ne jamais manquer à mon devoir envers vous et votre royaume. Je ne cesserai de vous tenir informé de ma progression et continuerai sur ma route, pour vous et votre gloire.
Je vous prie par ailleurs de bien vouloir adresser mes hommages à la juste, douce et belle Reine Ewine. Dites-lui qu’en plus de ma loyauté envers vous, je pense à elle chaque matin et chaque nuit et que je lui souhaite tout le bonheur du monde à vos côtés.
Fidèlement,
Votre cousin, le Seigneur Ironfist.
Quatrième jour du mois de la Libellule, an de grâce 632.
A mon cher Seigneur, le Roi Ragnar,
Cela fait déjà plus d’un mois que ma dernière missive a été déposée à proximité de ces mystérieuses portes. Mon plus fidèle serviteur y attend toujours, avec l’espoir que cette barrière que se moque de notre retour se dissipe un jour et qu’il puisse vous apporter les preuves de ma fidélité et de ma contribution à rendre votre royaume toujours plus vaste. J’ai déménagé mes quartiers généraux à quelques pas d’ici, un peu plus bas dans les collines, dans une paisible vallée.
C’est un endroit curieux et au départ, je pensais que ces terres étaient dépourvues de tous ceux qui marchent debout et qui parlent. Plusieurs fois, je me suis demandé ce que j’allais faire ensuite. J’ai même douté que tout ce qui m’entoure existât vraiment. Mais le septième jour après notre arrivée dans la vallée, un paysan errant traversa les bois et, pensai-je, il serait votre premier serviteur en ce monde.
J’essayai de le faire travailler. Il abattrait des arbres, pourrait semer des céréales pour faire mon pain. Mais il était récalcitrant, comme d’ailleurs la plupart des paysans. J’ai donc finalement jugé inutile de m’abaisser quelque peu à lui parler longuement. Nous avions là un grave problème. Il était hors de question que mes serviteurs, armés, travaillassent ; après tout, c’était là le rôle d’un paysan. Quoique tenté d’en finir avec lui, je compris que si nous ne parvenions pas à le raisonner, nous pourrions mourir de faim l’hiver prochain, si toutefois hiver en ce pays il y a.
Je lui demandai où je pourrais trouver ces créatures et des gens qui seraient prêts à me servir. Il marchanda longuement son secret, ce qui me parut fort déplaisant. Finalement, j’acceptai de le payer à la condition qu’il me révélât les informations que j’attendais de lui et qu’il m’expliquât comment asservir tous ces gens. C’est alors qu’il me fit une réponse laconique :
« Qui bâti, séduit ! » Je fus saisi de colère d’entre de telles sottises. J’étais prêt à le tuer, lorsque finalement il s’expliqua. Le lendemain, nous commençâmes la construction de plusieurs granges. J’avais dû batailler un peu pour convaincre mes hommes qu’il ne s’agissait pas seulement du travail d’un paysan, que nous devions aménager des refuges avant de dresser notre camp. Même avec cette explication qui pourtant tombait sous le sens, la plupart étaient réticents à s’exécuter à des tâches qui, de coutume, n’étaient pas les leurs. Je fus contrait de leur offrir quelques pierres précieuses, pour les forcer à admettre un peu de dignité dans ce qu’ils refusaient de faire.
Comme prévu, le matin qui suivit la construction des granges, je fus réveillé par une délégation de paysans qui attendait dehors, devant me tente, venue me demander l’autorisation d’occuper les demeures que nous venions d’aménager.
Je réfléchis longuement avant de me résoudre à m’abaisser pour leur parler. Puis je leur expliquai qu’en s’installant sur une terre qui m’appartenait et en habitant dans des logis que j’avais pris la peine de construire avec mes hommes, ils devraient allégeance à leur souverain. Ils devraient labourer les terres, me payer la dîme et se battre en temps de guerre. En échange, je leur assurerais la protection de mon épée. Ils acceptèrent sans discuter. Nous gardâmes trace de cet accord sur un parchemin. Les paysans emménagèrent le jour même et se mirent au travail.
Ces événements me firent réfléchir et je demandai à cet astucieux paysan de me donner quelques conseils. Tenant compte de ses dires, le jour suivant, j’ordonnai à mes hommes de construire des cabanes faites de paille et d’autres de rondins de vois. Il m’en coûta plus d’argent cette fois, mais ce n’était rien comparé à ce que j’allais recouvrer auprès de mes paysans, quoiqu’il ne s’agît que de quelques pièces en cuivre. Les cabanes durent terminées et, à ma grande surprise, des Gobelins et des Orcs sortirent des bois, désireux de me servir en échange de quelque endroit où loger. Nous signâmes alors un accord semblable à celui qui m’unissait aux paysans.
Très franchement, mon cher cousin, ces pauvres créatures semblaient chercher un chef et un héros qui pourrait leur procurer un toit. Elles ne sont pas indépendantes ; au contraire, elles souhaitent entrer au service de quelque souverain, pourvu qu’il leur promît à peu près tout. J’ai entendu de leur propre bouche que c’était leur droit et que leur souverain devait leur assurer toutes sortes de choses. Il me fut aisé de les convaincre que j’étais leur chef. A présent, ils sont miens, ils redoutent de perdre ce que je leur ai donné.
C’est ainsi que je commençais à bâtir tout un village, auquel nous avions d’abord l’intention de donner votre nom. Ma seule crainte fut que ce village demeure trop petit pour mériter un tel honneur. Nous avons donc choisi notre nom de famille. Ainsi, si le village doit tomber, on pensera que son nom était celui de votre humble serviteur. Il m’en a coûté beaucoup de commencer sa construction, mais même à présent, une faible quoique régulière somme d’argent commence à rentrer, ces créatures ont toujours quelques pièces de cuivre dans leurs poches ; je me demande encore d’où celles-ci proviennent, puisqu’il n’y a personne pour les frapper. Je vais continuer à construire toutes sortes d’édifices. Je verrai bien quelles autres créatures vont venir.
Je vous prie de bien vouloir transmettre à Lady Ewine mes plus tendres pensées. Dites-lui que je garde en mémoire les merveilleux moments que nous avons passés ensemble. Elle saura de quoi je parle.
Dix-huitième jour du mois de la Licorne, An de grâce 633.
Cher cousin Ragnar,
Cela doit faire un an que je ne vous ai pas écrit, mais je pense que vous aviez d’autres soucis en tête. Je dois ajouter que mon messager m’a rapporté que les portes sont encore fermées et que personne ne peut les franchir. Après quelques mois, il a jugé nécessaire de cesser toute surveillance. Il m’a également expliqué que les deux précédentes missives que j’avais laissées en haut du pilier à votre attention n’avaient pas été emportées. Néanmoins, je continuerai à vous écrire.
Grâce à mon autorité et ma force, beaucoup de choses ont changé dans cette vallée, qui se trouve désormais sous mon contrôle et que j’ai baptisée la Vallée de Ragnar, tout à votre honneur. Là où auparavant s’étendait la forêt se dresse une ville prospère. J’ai fait construire bien d’autres édifices encore, puisant dans toutes mes richesses. Je sais que vous, mon Seigneur, seriez fier à la vue de ce que j’ai bâti en votre nom et qu’un jour viendra où vous me rembourserez. Vous trouverez ci-joint une liste détaillée de tout ce qu’il m’en a coûté. Tout l’argent que j’ai gagné a permis d’entretenir les édifices.
Pour la gestion de ma baronnie, j’ai cru bon d’accroître la population de mon royaume. Par conséquent, je demandai que l’on construisît de nombreux types de demeures pour que vécussent sous ma bannière plusieurs hôtes. Avec la construction d’une maison en briques, des ogres puissants sont venus s’installer dans la vallée. Lorsque je donnai l’ordre d’aménager un pont pour que l’on pût traverser le fleuve Morglin, j’eus l’agréable surprise de découvrir un Troll le lendemain qui s’y était installé. Comme pour les autres, j’ai signé des accords sur des parchemins. Toutes ces créatures me considèrent comme leur souverain.
Les Loups constituent toujours des alliés intéressants. Leur grande mobilité leur permet de semer la terreur de très loin. Par conséquent, j’ordonnai qu’on aménageât des tanières. Le lendemain, d’énormes Loups sortirent des bois et me proposèrent leurs services.
Ensuite, j’ai cherché de la main d’œuvre qualifiée. Les paysans m’avaient souvent parlé de sorciers. En creusant un puits, dont l’eau fraiche permettait de refroidir l’acier, un forgeron et bientôt une armées de fantassins furent désireux de travailler pour moi. Puis les paysans défrichèrent un champ. Ils y installèrent des cibles et des archers apparurent. On construisit une taverne près du pont et voilà que des spadassins vinrent de se désaltérer, parlant de dés et d’échecs.
Nous avons encore prévu bien d’autres choses, mon Seigneur. En ce moment même, nous construisons des édifices encore plus curieux : de petites cabanes installées dans la cime des arbres, dans le but de permettre à des fées de nous rallier. Les terres sur le versant dans montagnes furent équarries pour que des nains pussent me servir, tandis qu’en pleine forêt, on me conseilla de disposer des cibles ici et là pour que des elfes s’entraînent chaque jour à leur sport favori.
En plus de me servir, je me suis laissé dire que les elfes et les nains pourraient nous aider à construire ces choses faites de pierres disposées en cercle et qui font le bonheur des druides, à aménager des près pour les Licornes et de redoutables tours rouges pour le puissant Phénix.
Je bâtis une demeure pour ceux qui manient la magie. L’un d’eux est déjà à mon service. Il me coûte, mon Seigneur, de maîtriser les sorts. Les ressources commencent à manquer et j’ai donc pris la décision de laisser de côté les arts de la magie. Pour le prix d’un seul sort, je puis recruter une troupe entière de paysans. Je me rappelle ce stupide Guthbert, le magicien de votre cour. Il ne valait pas grand-chose, si ma mémoire ne me fait défaut.
Puisque j’en viens à parler d’argent, laissez-moi attirer votre attention sur les dizaines de milliers de pièces d’or que j’ai dû dépenser au cours de ma singulière aventure, que j’ai commencée dans le seul but de glorifier votre nom. Mes poches sont comme trouées, mon cher cousin, et même si mes serviteurs commencent à me ramener quelques pécune, c’est bien loin d’être suffisant. Par conséquent, si jamais cette lettre vous parvient, je vous demanderai de bien vouloir financer une partie de ces opérations. L’argent est le nerf de la guerre ; votre bannière ne peut flotter sur ce royaume, mon cher cousin, sans que vous y apportiez votre contribution.
Oui, je dois ajouter à cela que j’ai érigé une modeste demeure pour ma propre personne. Je l’ai appelée Morglinis Keep. J’ai choisi son nom après mûre réflexion ; en l’honneur de l’un de vos serviteurs.
Lorsque les semences du printemps seront terminées, je comte partir à l’aventure avec quelques uns de mes hôtes. J’ai cru comprendre que ces terres étaient immenses et que si l’on y regarde attentivement, des richesses y sont cachées ; la gloire ne doit plus être très loin. Cette gloire, vien entendu, vous sera entièrement dédiée.
Mes amitiés à Lady Ewine.
Vingt-neuvième jour du mois de l’Aardvark, An de grâce 635.
Cher cousin,
Cela fait maintenant plus deux ans que j’ai placé ma dernière missive au pied des portes par lesquelles je suis entré dans ce monde. On m’a informé que mes autres lettres ne se trouvaient plus sur le pilier érigé à cet effet. Je sais aussi qu’aucune réponse n’était présente. Peut-être n’avez-vous jamais trouvé ces mystérieuses portes ; il n’est pas impossible que des voleurs se soient emparés de missives qui vous étaient pourtant adressées.
Je suis parti en expédition pour explorer de nouvelles contrées et ai enduré deux longues années de campagne. Au départ, rien ne se produisait, quoique mon attention me fît découvrir des mines recelant des métaux rares, des trésors, et d’autres choses inespérées. J’ai également fait la rencontre de créatures étranges et redoutables. A proximité d’un vieux cimetière, j’ai dû affronter des spectres. J’ai rencontré des bêtes errantes capables du pire et les ai vaincues pour la propre gloire.
Après avoir erré de longues semaines, je finis par arriver aux portes d’un village. Tandis que j’approchais, les habitants se mirent à l’abri derrière les murs. Puis ils grimpèrent sur les remparts et firent de grands gestes. Ils produisaient des bruits étranges, avançant leur langue et prononçant des jurons et des morts bien vulgaires, au sujet de vos ancêtres et de leur descendance. Je les attaquai sans attendre. Je fus dans un premier temps repoussé, j’ai d’ailleurs perdu beaucoup de mes paysans et des mes spadassins. Puis je parvins à investir la place. Mes hommes avaient construit des machines de guerre. Les catapultes que nous avons utilisées nous permirent bientôt d’ouvrir une brèche dans les remparts. Je fus tenté, puisque mon honneur avait été bafoué, de brûler cette place grossière et de tout asservir. Avant même que je n’aie eu le temps d’en donner l’ordre, mon conseiller, autrefois misérable paysan et aujourd’hui chambellan respecté, me fit comprendre que je pourrais mettre le village entier sous mon joug et qu’il me procurerait des richesses inespérées.
C’est là-bas que j’ai appris tout ce que je sais de ces terres. Le village dont je m’étais emparé obéissait à un Barbare et recelait des créatures uniques en chaque lieu. Je recrutai alors Orcs, Loups, Ogres et Trolls, ainsi que des Cyclopes très puissants. Par ailleurs, je découvris qu’il existait beaucoup de villages comme celui-ci dans toute la région. Certains n’abritent que des humains. D’autres sont sous le contrôle de sorcières et de créatures dotées de pouvoirs magiques qui hantent les lieux. Quelques villages, bien plus difficiles à trouver, sont sous la domination de magiciens et entre leurs murs résident toutes sortes de créatures puissantes et redoutables ; des Minotaures, des Gargouilles et même des Dragons. Je ne suis pas encore prêt à affronter tout ceci, aussi je m’arrangerai pour ne pas mettre les pieds dans de telles cités.
J’ai également découvert qu’il existe d’autres rois, lesquels osent avoir les mêmes prétentions que moi sur ces terres. Eux aussi déclarent la guerre pour protéger leur royaume. Ils recrutent des héros très capables et je sais maintenant que leur pouvoir est considérable. Ils vont essayer de freiner notre progression. Je ne puis rien faire d’autre que les affronter avant qu’ils ne me portent un coup fatal.
Je prévois à présent de poursuivre mon chemin et de me mettre à la recherche de ces royaumes dans le but de les humilier, puis de hisser votre bannière et de glorifier votre royaume.
Mes amitiés à Ewine. Demandez-lui de ma parti si elle a toujours sa marque de naissance.
Troisième jour du mois de la Mangouste, An de grâce 638.
Ragnar,
Je ne vous ai écrit aucune lettre depuis trois ans. Je n’ai aucune nouvelle de vous. Je me demande même si vous avez connaissance de ma situation et de votre nouveau royaume. Peut-être avez-vous eu vent de tout ceci mais ne souhaitez pas me répondre. Quoi qu’il en doit, je maintiens les sommes exigées dans mes précédentes missives ; j’ai conservé un double du détail de ces sommes dans le cas où vous n’auriez rien reçu.
J’ai mené trous campagnes, longues et périlleuses, depuis la dernière dois que je vous ai écrit. Nous sommes parties du premier village que nous avions investi, avons erré dans ces étranges contrées pour traverser montagnes, déserts, marais et forêts. Nous avons fait de nombreuses rencontres, affronté des créatures extrêmement puissantes, mais d’autres aussi on désiré nous rallier plutôt que nous combattre. Tous ceux qui ont osé se mettre en travers de notre route, leurs os en ce moment même pourrissent et nourrissent multitude d’insectes.
Après de longues semaines de marche, nous tombâmes dans une embuscade. Ces soldats étaient venus nous barrer la route. La lutte qui s’ensuivit fut acharnée et sanglante. J’affrontai finalement le chef de cette armée seul à seul et sortis vainqueur du combat : je le fis immédiatement prisonnier. Quelques temps après, je reçus une missive qui m’était envoyée par le Seigneur à qui obeissait le héros vaincu. Il me proposait de le racheter. Je refusai : la somme d’argent qui m’était proposée n’était pas à la hauteur du combat que j’avais mené. Je reçus une nouvelle offre, celle-ci beaucoup plus alléchante. J’acceptai, ce qui me permit de remplir mes coffres, lesquels étaient bien vides. Je relâchai alors le prisonnier et lui assurai que je le retrouverais un jour sur mon chemin, ce que je souhaite, car je n’ai pas encore trouvé meilleur moyen de faire fortune.
Nous arrivâmes enfin dans un village situé sur le littoral. Il fallut se battre pour en prendre le contrôle. Je fis un autre prisonnier, lequel s’avéra désireux de me servir. C’est lors que je pris une importante décision. Je divisai mon armée en deux groupes, l’un restait avec moi, l’autre rejoignit ma nouvelle recrue. Nous achetâmes plusieurs navires et mon champion embarqua pour conquérir des terres plus lointaines. Il me tenait informé de sa progression et parvenait même à m’envoyer des cartes de tout ce que croyais posséder. Je dis « croyais » car malheureusement, il fit la rencontre d’un magicien que le Mal motivait. Ni lui ni son armée ne survécurent.
Alors commencèrent les jours difficiles. Le prince d’un autre royaume envoya une armée très puissante investir mon siège, ces mieux qui, vous vous le rappelez peut-être, portaient votre nom.
La faible garnison qui y demeurait ne put rien faire et le village fut pris d’assaut. Les difficultés commencèrent, puisque mes principales ressources me faisaient maintenant défaut. Il nous fallut revenir sur nos pas pour reprendre ce qui nous revenait de droit. Si j’ai réussi, j’ai aussi perdu tous les autres villages qui nous appartenaient.
Seigneur Ragnar, comprenez que je mène une lutte difficile et que vous ne m’êtes pas venu en aide une seule fois. Je puis vous assurer que vingt ou trente mille pièces d’or me seraient d’un grand secours, ou je ne pourrai maintenir plus longtemps ces terres dans votre royaume.
Demandez à Ewine si elle se souvient encore de ce que depuis nous avions tous deux appelé notre « nuit de folie ».
Onzième jour du mois du Lézard, An de grâce 641.
Ragnar,
Si j’ai survécu durant ces trois longues années qui se sont écoulées, ce n’est pas à vous que je le dois. Un immense désespoir a fini par m’envahir. Il me reste toujours mon château, que mes gens veulent désormais appeler Ironfist Keep. Par deux fois j’ai dû repousser les violentes attaques de mes adversaires.
Je fis chaque fois un prisonnier. Le Général de la première armée, je l’avais déjà capturé dans le passé. Je me suis dit que je pourrais l’échanger contre une rançon. Mais jamais plus je n’entendis parler du Seigneur qu’il servait. Je lui demandai de m’obéir, mais il refusa. Contraint de respecter les règles dictées par la noblesse de son sang, je lui laissai la vie sauve et le libérai. J’avais perdu un héros et mes coffres restaient définitivement vides.
Avec mon second prisonnier, la situation fut toute différente. Je lui fis immédiatement une offre qu’il accepta sans réticence. Désormais, il servait sous mes ordres. J’en avais fait un allié très puissant. Peu à peu ma fortune grandissait, au point que je pus investir dans de nouvelles demeures et recruter d’autres types de créatures dans mon armée. Je compris aussi qu’il était possible de remporter une grande victoire en avançant avec un effectif considérable, mais que cette stratégie rendait le château beaucoup trop vulnérable.
Lors du troisième et dernier assaut, l’offensive fut repoussée sans difficulté. J’entendais les pleurs des soldats qui regrettaient de nous avoir attaqués. J’aménageai ensuite des arènes – il m’en coûta fort cher – pour faire venir de nobles et valeureux chevaliers. J’ordonnai également qu’on érigeât une cathédrale ; de puissants paladins se présentèrent et se mirent à prier.
Je ne négligeai la magie en aucune façon. A quelque chose malheur est bon : je n’oublie pas que c’est elle qui m’avait vaincu jadis. Quoique coûteux et difficiles à maîtriser, j’ai cherché à me procurer un grand nombre de sorts. Et cela en valait la peine, je crois.
Les pouvoirs des magiciens sont fascinants. Ils maîtrisent un art que bien des magiciens de votre cour leur envient : sorts de protection et d’attaque, sortilèges qui peuvent réduire en cendres une armée entière ou la changer en glace. Mes magiciens disposent de sorts d’enchantement et d’autres qui paralysent les épiées et les lances. D’autres me sont d’une grande aide pour prendre villages et châteaux à mes ennemis.
J’ai poussé un peu plus loin la découverte des arts de la magie. Je possède maintenant un sort qui renvoie dans l’au-delà les spectres et un autre qui détourne la magie de mes adversaires. Je peux protéger mes guerriers et augmenter la force de leurs coups, aveugler les soldats ennemis pour qu’ils ne puissent plus savoir où porter leur attaque.
Je tiens à ajouter du Guthbert, qui se prétend sorcier et qui m’a causé tant de mal avec sa langue trop bien pendue, n’aurait jamais pu résister aux pouvoir des magiciens que j’ai moi-même eu à affronter.
Puis j’ai commencé à fréquenter des guildes de voleurs ; lesquelles m’ont permis de découvrir bien des secrets qui m’ont été d’un grand secours au cours des différentes campagnes que j’ai menées. Ainsi, après avoir quelque peu renforcé mes pouvoirs, je mis sur pied une expédition, pour laquelle je dis appel aux services d’un autre héros. Je comptais maintenant sur trois armées. La première obéissait aux ordres d’un héros digne de confiance, lequel avait l’ordre de défendre le château. Un second groupe de créature partit vers le sud pour conquérir de nouvelles terres ; rien ne pouvait les empêcher de rejoindre le littoral. Pendant ce temps, je parcourais de vastes plaines en direction de l’est.
Les troupes que j’ai envoyées au sud atteignirent la côte, quelque part où je m’étais déjà rendu jadis. Ils s’emparèrent d’un village, aujourd’hui devenu une place forte. Un phare fut construit ; il aide encore aujourd’hui nos navires à se diriger. Je demandai au héros de cette armée de rester vigilant ; les mers de ce monde sont peuplées de redoutables créatures et de brigands. D’autres héros parcourent les océans en quête de gloire.
Mon héros finit par accoster, ses troupes prirent d’assaut le village d’une sorcière ; notre pouvoir a ainsi considérablement augmenté. Notre royaume comptait à présent quelques îles ; leurs richesses virent remplir mes coffres. Encore des ressources sur lesquelles l’ennemi dut faire une croix !
Et puis le Sort a encore frappé. Une pluie de gros cailloux et des flammes venus tout droit des cieux anéantirent l’armée de mon champion. Au fur et à mesure que mes pouvoirs augmentaient, d’autres rois qui avaient les mêmes prétentions sur ces terres s’organisaient pour tout mettre en œuvre contre moi. C’est ainsi que nous perdîmes toutes nos conquêtes vaillamment rempotées au sud.
Je savais qu’en restant sur la défensive, l’ennemi pourrait se présenter un beau jour à mes portes. C’est pourquoi je préférai anticiper toute éventuelle menace ; Mais cette fois, pas question de priver ma capitale de ses défenses. Ma stratégie était différente et j’avais vu juste. Par je ne sais quel tour de magie, une armée se matérialisa un beau jour devant les portes de mon château. Nous parvînmes à les repousser, essuyant néanmoins de lourdes pertes : nombreux furent les guerriers et les sorciers qui périrent au combat.
Je sais aujourd’hui que j’avais négligé les créatures telles que les Gargouilles, les Minotaures, les Hydres et, la plus puissante de toutes, les Dragons. Aussi je décidai sans plus tarder de me mettre en route, en quête du château d’un Mage. Bien que valeureux, le paladin ne peut pas faire dans chose en face d’un Dragon. Ce ne sera pas chose facile que de s’emparer d’une forteresse si bien gardée.
J’aimerais le savoir, la poitrine de Lady Ewine est-elle encore aussi appétissante qu’il m’en souvient ?
Vingt et unième jour du mois du Rat, Première année de la Nouvelle ère.
A Ragnar, l’usurpateur,
Je ne vous ai rien écrit depuis cinq ans. Je vous imagine très bien à ce jour, votre poids vous obligeant à rester assis, accroché tel un parasite à la couronne de votre Trône, un trône dont vous acceptez les responsabilités sans jamais vraiment u faire face.
Mon pouvoir en ce monde n’a pas cessé de grandir. Tout allait mal mais, tel le phénix qui renaît de ses cendres, j’ai fini par remporter toutes les batailles que j’ai menées. Je me suis emparé de bien des citadelles, de villages et MA bannière est hissée à peu près partout sur ces terres. La plupart des héros ont décidé de se battre pour servir ma propre cause. Je me demande à quoi ressemble ce qui se trouve entre les murs de cotre château. Tandis que les bardes chateront plus tard la gloire associée à mon souvenir, de vous le peuple ne retiendra probablement rien d’autre que l’image d’un roi et d’une reine qui n’ont jamais regardé au-delà des murs de leur château.
A l’issue de ces longues années durant lesquelles j’ai tout mis en œuvre pour devenir invulnérable, à constituer des armées de paysans et de fantassins, à mettre sur pied une troupe montée, des légions entières d’Ogres, de Gobelins et de Trolls, à maîtriser l’art de la magie et à faire des Hydres et des Dragons de précieux alliés, j’ai pris la décision de prendre le contrôle de toutes les terres que je foulerai de mon pied.
Trois rois ayant les mêmes prétentions que moi sur ces terres ont unis leurs forces pour ralentir ma progression. Ils m’ont tendu des pièges habiles et leurs châteaux sont très bien défendus. Nombreux furent ceux qu’ils envoyèrent me barrer la route. J’ai dû faire face à six armées différentes qui provenaient de tous les côtés ;
C’est alors que je fus récompensé de tout ce que j’avais investi dans la magie. Par deux fois je parvins à téléporter des armées entières et à leur faire traverser mon empire aussi prestement que le souffle du vent. Des armées que je plaçai en tête pour affronter les troupes ennemies qui m’en voulaient directement. Je parvins à maîtriser un Oracle dont les pouvoirs, conjugués aux informations que me fournissaient les guildes de voleurs, me permirent de lire les secrets et les intentions de tous mes ennemis. Ainsi je sus où envoyer mes troupes, n’hésitant pas à envoyer des créatures anéantir les armées les plus faibles de mes adversaires.
Les coûts imposés par de telles campagnes militaires sont immenses. Tout ceci n’a duré qu’un mois, mais j’ai dépensé ce que je considérais il n’y a pas si longtemps comme une véritable fortune. Mais comme ont dit, à cœur vaillant, rien d’impossible.
J’ai fini par mettre deux de mes principaux adversaires hors d’état de nuire. Il ne restait plus que Lord Alamar en travers de ma route. A bon chat, bon rat. Ragnar, tu n’es qu’un misérable mendiant comparé à un seigneur comme lui ; Nous avons longuement lutté. Il lança une offensive qui ravagea une grande partie de mon royaume, me forçant à utiliser la magie pour me téléporter, moi et mon armée, en des lieux sur lesquels j’allais devoir préparer une contre-offensive.
J’arrivai enfin devant les portes de sa cité. Une cité immense et magnifique. Mes catapultes détruisirent ses tours. Les dragons s’affrontaient dans le ciel. Les hydres se dévoraient au sol. Des légions entières de spadassins, d’archers, de nains, d’Orcs et de paysans s’affrontaient. Les cadavres jonchaient le sol. La magie me permit finalement de franchir les remparts du château. La lutte se déroula : sorts, feu et épée contre le grand seigneur Alamar et ses sorciers. Les paysans en parlent encore aujourd’hui à la veillée. Il était fort, puissant, avec son épée, sa magie dévastatrice, sa stratégie sans faille. Je finis pourtant par prendre l’avantage. Mon seil regret reste qu’il fur en mesure de battre en retraite et de s’enfuir dans de lointains royaumes.
Alors maintenant, Ragnar le porc, saches que je possède tout dans ce monde. Toutes les créatures me considèrent comme leur unique et légitime souverain. Je régnerai dans la justice et la sagesse : une ceinture dorée semblable à la tienne ne me suffit pas. Je défendrai ce royaume et ses frontières ; j’ai eu vent de guerres qui se déroulent un peu plus loin. D’autres rois ont l’intention de me reprendre ce que j’ai acquis par le courage.